Ces dernières années les collectivités ont pris l’habitude de vouloir subventionner de plus en plus de projets qui sortent des financements traditionnels des associations du territoire. L’actualité de l’invasion de l’Ukraine par la Russie a vu de nombreuses collectivités choisir de soutenir le peuple ukrainien soit matériellement soit financièrement.
Mais ont-elles seulement le droit de faire cela ?
Il faut se rapporter à deux règles de bases la première c’est que chaque collectivité ne peut engager de l’argent public que pour faire face à leurs compétences. Si la compétence de la coopération internationale est inscrite au Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) sous la dénomination de coopération décentralisée ce dispositif est largement limité tant dans la forme que dans le contenu par les articles L.1114-1 et suivant du CGCT. L’article L.1114-1 dispose par exemple que « Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent conclure des conventions avec des collectivités territoriales étrangères et leurs groupements, dans les limites de leurs compétences et dans le respect des engagements internationaux de la France. »
En outre la deuxième règle c’est que l’aide doit service l’intérêt général de la collectivité, du territoire ou de sa population. Cette règle qui ne fait finalement que traduire les dispositions générales du CGCT a été à plusieurs reprises rappelée par le législateur et la jurisprudence (‘article 9-1 de la Loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations). Ainsi dans sa décision CE, 11 juin 1997, Département de l’Oise, n°170069 le Conseil d’État rappelle qu’en dehors d’un financement dans les limites géographiques de la commune il faut justifier de l’intérêt local de la mesure.
Le cas des subventions de la restauration de Notre Dame de Paris :
Pour revenir à un cas précis et assez actuel, à l’occasion de l’incendie de la Cathédrale Notre Dame de Paris de nombreuses collectivités ont voté des subventions pour participer au financement des travaux de restauration. Dans ce cadre la jurisprudence (par exemple : TA de Nîmes, 15 juin 2021, req. n°1901791) a annulé la subvention de collectivités pour cette action. Pour permettre aux collectivités locales d’intervenir, une loi a dû être prise en ce sens. L’article 4 de la Loi n°2019-803 du 29 juillet 2019 dispose que « Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent également opérer des versements au titre de la souscription nationale auprès de l’État ou de l’établissement public chargé de la conservation et de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris.» Sans cette loi les subventions des collectivités, en dehors de la ville de Paris et la Région Ile de France, auraient pu être frappée de nullité en cas de recours.
Pour résumer deux premières questions se posent pour permettre à une collectivité de verser une subvention : sa compétence et la justification de servir l’intérêt général de sa collectivité, de son territoire ou de ses habitants. Ensuite doit se poser la question de savoir à qui peut-on verser la subvention, association, États, autres collectivités, entreprises, particulières, mais ça mériterait bien d’autres approfondissements…
Dans le cas des subventions décidées par les collectivités locales au profit de l’Ukraine tout dépendra de la volonté des Préfets à les retoquer dans le cadre du contrôle de légalité ou des recours que pourront porter les membres des assemblées délibérantes. Tant qu’un jugement n’a pas frappé la délibération de subvention de nullité, elle reste valide. Par contre attention au risque de voir la délibération annulée a posteriori et de devoir demander le remboursement de l’argent versé au bénéficiaire.
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